” Je m’appelle Julie, je suis psychologue. La dermatillomanie était mon ennemie. Elle est devenue mon amie !”

Derti-quoi ?

Aurais-je vécu ce qu’on appelle la dermatillomanie autrement si j’avais pu lui donner un nom ? Peau-ssible mais possiblement pas.

Quand je découvre ce compte il y a peu de temps, je réalise à nouveau à quel point ce trouble était si profondément caché que je n’aurais pas été capable de lui donner un nom, un semblable, une compréhension.

Car ce qui était pour moi mon « petit TOC » ne recouvre pas une souffrance partagée ou généralisée mais bien la particularité d’une histoire et ses profondes traces silencieuses, celles-là même qui n’arrivent plus à se dissimuler et viennent se rendre visibles. Il n’y a pas La dermatillomanie, mais ta dermatillomanie et la mienne, ta peau et la mienne, ton passé et mon passé, ta douleur et ma douleur.

Aurais-je laissé une place à l’autre, à un partage ? Je n’en suis pas certaine.
Car ce qui est vicieux dans ce comportement c’est surtout qu’il rend le regard de l’autre capable de nous détruire, alors que c’est notre propre regard qui nous touche, qui nous triture, qui nous blesse.

Toutes ces années, je me suis demandée ce qui était le plus dur : la solitude induite par ce comportement destructeur qui nous pousse à nous isoler, ou la projection que l’autre nous aimerait moins s’il nous voyait tel quel ?

Si je n’ai jamais cherché à comprendre autrement qu’en moi-même les causes et les sources de cette obsession, c’est parce qu’elle n’est pour moi pas un trouble isolé justement.
Si la dermatillomanie est une manifestation physique d’un trouble du comportement, celui-ci n’est jamais dissociable d’une douleur psychique bien plus dévastatrice. Anxiété, ultra-perfectionnisme, rigidité, hyper contrôle, manque d’estime et de confiance en soi, angoisses d’abandon…la liste est malheureusement bien plus complexe qu’un simple souci de « se percer les boutons ».

« Mais arrête ! « Mais pourquoi tu fais ça ? » 

« Mais arrête de te regarder dans le miroir ? »

Des injonctions vaines et basées sur la volonté et la conscience, alors que notre inconscient nous parle tellement plus fort. Bataille perdue d’avance.

« Je vais tenir, je sens que ça ne va pas mais je ne vais pas craquer car sinon je vais me retrouver défigurée et je serais mal après. »

Combien de fois j’ai senti la tension montée, j’ai réussi à lui donner un sens, j’ai tenté de la comprendre et la maitriser. Bombe à retardement.

« Putain mais il est où mon correcteur ? »

« Ah non merci c’est gentil mais je préfère rentrer à la maison. »

« Non, je n’ai pas envie de me baigner »

Aller à la piscine ou à la plage, partir en vacances avec des amis, dormir chez quelqu’un, faire du sport, aller à un festival…Des interdits choisis, subis.

« T’as quoi sur le front ? »

« C’est quoi ces croûtes ? »

Des questions banales qui font mal. Des mots augmentant nos maux.

Comment sortir ? Sortir de cette obsession, sortir de chez nous, sortir de cette culpabilité, sortir de notre histoire engluée ?

Est-ce que finalement on n’essaierait plutôt pas d’y entrer ? Entrer dans la relation avec les autres, entrer dans ce que notre douleur nous dit, entrer dans la parole et les mots.

Je m’appelle Julie, je suis psychologue et la dermatillomanie n’est plus mon ennemie.

Il n’y a pas de solutions miracles, ni de parcours linéaires et déjà tracés pour guérir, ni d’efficacité validée à des traitements et prises en charges spécifiques. Il y a d’abord une obsession, une souffrance, parfois une destruction ; et puis aussi une volonté, des ressources, une force à trouver, en soi mais aussi en l’autre.

Cette force n’est pas toujours constante mais il faut la faire grandir, la nourrir afin qu’elle ne donne plus autant de poids aux symptômes, afin qu’on puisse au final distinguer une manière de toucher sa peau saine d’une manière pathologique.

Soigner sa dermatillomanie c’est prendre son chemin personnel, particulier et original pour comprendre à quoi elle sert. C’est identifier pourquoi elle est à la fois notre meilleure amie et notre pire ennemie. Comme une pote jumelle trop collante qu’on n’arrive pas à virer autant qu’on en a besoin et on l’adore.

On l’adore car elle permet de lui refourguer tout ce qu’on n’aime pas et de lui faire porter la culpabilité de notre mal-être. C’est à cause de la derma que je suis mal, c’est ce qui m’empêche de faire, c’est ce qui me rend faible. On lui fait porter un chapeau qui est pourtant bien trop petit pour tout ce qu’il contient. Car ce comportement qui nous détruit cache souvent tellement de douleurs que la derma est presque apparue pour nous sauver. Nous sauver du risque d’aller fouiller dans notre passé, dans la souffrance psychique, dans nos angoisses, dans nos manques…

Qu’on soit au début du chemin, au milieu ou à la fin, c’est long et ça fait mal. Petit à petit même si on arrive à se faire moins de mal, on découvre aussi toutes les difficultés qu’on a enfouies. On prend conscience, on lutte, parfois on laisse tomber et on fait une crise car on a plus la force. Le parcours est chaotique, mais il en vaut la peine.

Je m’appelle Julie, je suis psychologue et la dermatillomanie est devenue mon amie.

Grâce à elle, j’ai appris la connaissance de soi, le pouvoir vivre avec la peur, la recherche d’un équilibre, l’analyse des facteurs de risque, la capacité à vivre avec l’autre tout en lui laissant son regard et en conservant le mien…

 

–> Vous souhaitez consulter Julie en thérapie ? Voilà son  contact : Julie Betsch, basée à Bruxelles, orientation analytique. julie.betsch.chapelle@gmail.com. Téléphone : 0032470170278. Fait des consultations en présentiel et par visio (skype).

 

♥️ Témoignage à retrouver sur Instagram @peau.ssible

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