“Je suis dermatillomane et… mannequin ! Egérie d’une marque de cosmétiques… “
Des anonymes m’ont envoyé leur témoignage, leur histoire, des bouts de vie qu’ils ont partagés avec la dermatillomanie. Plongée intime dans les origines de leur mal-être et la manière dont ce trouble s’est développé en eux….
Bonjour à tous, je vais vous raconter mon histoire avec la derma de mon enfance à aujourd’hui, en tant que mannequin et Miss.
Je suis atteinte de ce TOC depuis ma toute petite enfance (environ 3ans), j’avais pris l’habitude de frotter sur ma joue une tétine jusqu’à en créer une croûte. Je cachais cette tétine sous mon oreiller pour que les adultes ne me l’enlèvent pas. Avec du recul le déclencheur étaient les relations tendues qu’entretenaient mes parents à cette époque.
En grandissant j’ai abandonné la tétine et j’ai commencé à gratter, principalement le visage, pour créer des égratignures que j’arrachais sans arrêt. Ça a été compliqué à comprendre pour les personnes qui m’entouraient et mes proches. Le personnel éducatif venait voir mes parents pour leur dire que je saignais durant les heures de classe, ce qui les culpabilisaient, et me mettait la pression pour que j’arrête de triturer ma peau comme si cela ne tenait que de ma volonté.
Sachant que mes crises se déclenchent dans des situations de stress, de fatigue ou d’ennui, et que l’école était une forte source de stress, cela n’arrangeait rien. Ne connaissant pas l’existence ni l’origine de ce TOC et voulant éradiquer mon mal, mon père a essayé tout un tas de choses en espérant me faire arrêter : me scotcher le bout des doigts avec du sparadrap, me couper les ongles, me mettre des gants, me punir ou même me promettre une récompense si je ne grattais plus. Sans le savoir cela a augmenté la pression et la culpabilité, et par extension les crises.
À l’adolescence j’ai commencé à percer boutons et points noirs de façon quotidienne devant mon miroir (tout en continuant de gratter les plaies). En m’attaquant cette fois à tout le corps (principalement visage et poitrine), mais aussi épaule, dos, ventre, et jambes. Je me suis rendue compte que certaines parties marquaient plus que d’autres, comme les jambes, alors que le visage presque pas.
C’est à cette période que j’ai commencé le sport, et les compétitions. J’ai augmenté l’intensité jusqu’à arriver à 10h par semaine vers 18 ans. Mon corps était devenu un outil que je traitais avec grand respect, pas de drogue, pas de tabac, consommation modérée d’alcool, sport quotidien. Je me suis également fait des amis, j’ai fixé des objectifs, j’ai affirmé un caractère fort, fait évacuer le stress des exams, de la famille, des compétitions par l’effort physique. Cela m’a permis de faire un vrai travail mental entre ce que je voulais et ce dont j’étais capable.
Petit à petit j’ai pris l’avantage sur la dermatillomanie, en acceptant quelle fasse partie de ma vie, mais que je peux la contrôler et contrôler ma culpabilité par rapport à celle-ci. Je laisse vivre mes crises sans essayer de les maîtriser dans certaines périodes, et à contrario, je me les interdis quand j’estime avoir besoin de le faire.
En 2018 je me blesse, ce qui complique mes activités physiques et me pousse à arrêter le sport. Cela a été très douloureux pour moi. Mais une porte qui se ferme est une fenêtre qui s’ouvre. Je suis rentrée dans le milieu du mannequinat et des concours de Miss. J’ai fait des défilés, Fashion Week à l’étranger, je suis égérie d’une marque de cosmétiques, je fais souvent des shooting photos, j’ai été Miss régionale pour un prestigieux concours.
C’est aujourd’hui, à 22 ans que j’ai découvert que j’avais ce TOC et que je n’étais pas seule. J’en garde évidemment des séquelles, toutes mes photos instagram sont retouchées au niveau de la peau (comme tout le monde d’ailleurs, ne croyez pas tout ce que vous voyez sur instagram…), je fais toujours mon check up quotidien devant le miroir et je vous écris même avec du dentifrice soigneusement appliqué sur chaque imperfection. Mais à coté de ça je sors également régulièrement sans maquillage, je sais réguler mes crises avant un événement important ou une séance photo et je m’assume complètement.
Je conclurai en deux parties.
- Premièrement ne vous faites pas de mal à regarder la peau, les cheveux et le corps des femmes et hommes sur internet, sur les affiches ou à la télé. Les photos sont retouchées, ils sont maquillés, ont des postiches, perruque, autobronzant… En ce qui me concerne j’aime que mes photos soient retouchées pour éliminer les quelques imperfections de ma peau, afin de satisfaire mon œil critique recherchant le cliché parfait. C’est un choix, mais je sais que j’aime ma peau sans artifices, et ça c’est une victoire.
- Deuxièmement si je devais donner un conseil aux victimes physiques et mentale de ce TOC, ce serait de vous mettre au sport. Passez quelques heures par semaine à faire évacuer la pression, à réapprendre à vivre avec son corps et à le voir comme quelque chose de positif. Si c’est un sport collectif (ce qui est encore mieux), cela permet aussi de faire de nouvelles rencontres, de partager de belles choses, de se fixer des objectifs et d’avoir moins de temps à passer à faire mal à votre peau. Surtout reprendre le contrôle, et réapprendre à vous aimer en faisant quelque chose qui vous fait du bien physiquement et mentalement.
Dans tout les cas je suis une personne sympa et je n’hésiterai pas à répondre aux questions et à discuter avec ceux qui le veulent 🙂 Son Instagram : @tio_josse
♥️ Témoignage à retrouver sur Instagram @peau.ssible
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